je serai ton miroir
I will be your mirror
2002
exposition personnelle
la verrière hermès (bruxelles)
Bernard Marcelis
iin artpress n°287
Tout est question de disposition dans la mise en œuvre de l’espace de « la Verrière» auquel sont confrontés les artistes invités chez Hermès. Vu la dimension volumétrique du lieu, rares sont ceux qui ont réussi à ne pas s’y laisser piéger. David Saltiel est de ceux dont l’intervention dans ce lieu ne sera pas passée inaperçue. Grâce à une mise en place qui semble aller d’elle-même, mais que l’on devine étudiée avec soin, Saltiel emmène le visiteur à la rencontre de cinq architectures identiques : elles possèdent le gabarit d’une cabane mais offrent l’aspect d’une maison. Il s’agit là d’une première perturbation visuelle qui ne manquera pas d’en amener d’autres, pour peu que le visiteur se laisse prendre au jeu énigmatique que lui propose l’artiste.
Si ces constructions sont limitées à un état de cabanes, elles ne constituent que des enveloppes et, à ce titre, toutes sont contenues dans une construction quasi similaire à la toiture elle aussi apparente, la salle de la verrière elle-même. Véritable mise en boîte, cette mise en perspective quasi tautologique trouve son prolongement dans une des cinq cabanes, la seule à être transparente, celle qui en abrite trois autres identiques mais à échelle réduite.
Installées dans l’espace de telle sorte que l’on puisse circuler autour de chacune d’elles sans pour autant pouvoir embrasser l’ensemble du regard, les cabanes ne sont pas alignées comme des cabines de plage mais entrent en dialogue les unes avec les autres, soit par effet de transparence, soit par effet de miroir. L’enveloppe, la coque de ces cabanes est tout aussi importante que leur contenu, quoique ce dernier ne soit jamais accessible de la même façon. Si toutes disposent bien d’une porte, ces dernières n’ont pas toujours le même usage. Certaines donnent accès à l’intérieur des constructions, parfois simplement par l’artifice de l’oculus qui déforme la vision ou la perturbe tout à fait, en jouant des effets de miroirs tant extérieurs qu’intérieurs.
Pour autant, le visiteur n’est jamais pris au piège, si ce n’est celui de la perception à laquelle il est plutôt invité à se confronter dans une ambiance cossue et musicale. Avec David Saltiel, les apparences sont en fin de compte plus trompeuses que la réalité, notamment parce qu’avec lui la notion d’échelle devient une réalité tangible, à la foi hors maquette et hors réalité, mais inscrite dans le présent de la perception sensorielle.
La relation traditionnelle entre le privé et le public, l’intime et le social, l’individu et le groupe est ici mise en cause à chaque instant, comme s’il s’agissait de définir un moi improbable confronté à un ailleurs appréhendable de façon tactile et physique dans un subtil décalage avec le monde qui nous entoure.
Everything is a question of arrangement with the use of space at “la Verrière”, confronting the artists invited here by Hermès. Given the volumetric dimensions of the gallery, rare are those who succeed without being trapped. David Saltiel is among those whose intervention at this lieu will not go unnoticed thanks to an installation that seems natural, but which we deduce was designed with precision. Saltiel leads the visitor to encounter five identical architectural structures that have the form of a cabin but present the aspect of a house. This is the first visual disturbance that won’t miss out on creating others by the simple fact that the visitor falls prey to the enigmatic game that the artist offers.
If these constructions are limited to the status of cabins, they not only constitute envelopes and, in this claim, they all have a roof as apparent as that of the “verrière” itself. An undeniable mockery, this putting in perspective quasi-redundant finds it’s prolongation in one of the five cabins; the only one that is transparent, the one which shelters three other identical, reduced scale cabins.
Installed in the space so that visitor can move around each one without being able to take in the ensemble transparence, or by the effect of a mirror. The envelope, the shell of these cabins is as important as their contents, although this will never be accessible in the same manner. If they all well have a door, it doesn’t always have the same use. Some give access to the interior of the constructions simply by the artifice of an opening that deforms the vision or even completely perturbs it in playing with the exterior as well as the interior mirror effect.
In spite of this, the visitor is never trapped, if this were only a perception for which he is more or less invited to confront in a rich and musical ambiance. With David Saltiel, appearances are, in the end, more deceiving than reality, notably because the notion of scale becomes a tangible reality, at the same time beyond model and beyond reality, however inscribed in the present with sensorial perception.
The traditional relationship between private and public, intimate and social, individual and group is questioned continuously, as if intending to define an improbable “me” confronted by a accessible elsewhere in a tactile and physical way and in subtitle discrepancy with the world around us.
la capitale (bruxelles) octobre 2002